Genèse

dimanche, 20 décembre, 2020

Il existe plusieurs aspects dans la TerrEvanescente. La genèse correspond à un élément déclencheur, assez lointain, toujours vivace, vivant. Ce terme pourrait rester en son état et chacun s’muserait à lui associer des mots, une définition, une ambiance; que sais-je. Il est inspiré d’une logique Carolienne à la mode Lewis : les mots valise. Terre d’un côté et Evanescence… Du même côté. L’évanescence est une propriété liée à ce qui est temporel. A ce qui s’efface, à ce qui s’évanoui, à ce qui disparaît. La Terre est ce que chacun oublie à chaque instant de sa vie écoulée. Nous sommes trop importants à notre propres yeux, disait Juan à l’dresse de Carlos. Nous œuvrons pour nous même et je ne parle pas des personnes considérée au titre d’individus. Non, il s’agit de l’espèce humaine coincée dans son assurance de domination et qui en 2020 ne comprend toujours pas pas qu’elle est en voie de disparition. Si on se place du point de vue du vivant, ce n’est pas grave et c’est même peut-être le seul salut de la planète. Car il existe de nombreux substituts au mot Humain : destructeur, prédateur, virus, cannibale… C’est vrai, la planète sans le genre humain n’intéresse pas grand monde. On a inventé les voies de garage, c’est pour s’en servir.

TerrEvanescente, est un lien avec notre planète en souffrance. Ne pensons pas écolos, il n’y a aucun rapport. Ce sont des humains dont il est question, juste eux, juste nous. La lecture du mot peut rattacher ceux que ça intéresse à ce que nous sommes vraiment, sans détour : de passage. Une infime particule insignifiante à l’échelle des univers. Gardons notre place de d’entité juste temporairement tolérée par notre éco-système. La part du rêve d’un passager qui se veut intacte… Ou presque.

Quelques heures plus tard, après les crêpes à la bière (100%). J’oubliais presque, TerrEvanscente est le nom de notre Van. Ça va être long. Et merci à Malika, ma femme, pour le soutien exprimé en tan que ministre des travaux. Tu est souvent venu me voir, n’y comprenant rien à la technique pour m’apporter de quoi boire et même manger ! De merveilleux pmoments pour me faire savoir ton interet dans ce projet qui est devenu le notre. Te souveiens-tu ? « Tu ne vas quand même pas me faire dormir dans une estafette de chantier ? Ca va pas non ! Aujourd’hui, tu l’a adoptée autant que moi… La camionette de chantier.

T800

Le 59 affiche les petites annonces ; oui, une sorte de camping car serait le mieux pour vadrouiller, découvrir les espaces du sud, donc partout en France lorsqu’on habite Lille. Un T800 aménagé en camping-car accroche mon regard. Pas de photo dans l’annonce bien sur, car le 59 n’est pas le boncoin ; nous sommes en 1995. 9500 francs et j’en ai 9000. J’appelle, je discute un peu du véhicule et de ses travers mécaniques. Il a  dix ans et le cardan gauche craque un peu dans les virage, me dit la dame au téléphone. J’entend une fillette crier en voie off : dit oui maman, dit oui. La maman se sens obligée d’expliquer l’agitation de sa fille. Pour tout dire, nous avons un autre projet camping car et la vente de ce fourgon le conditionne… Je peux l’emmener pour mon prix et ouais !! exprime la petite. Neuf ans de mémoire.

T800

Un comme celui-là…

Je me retrouve face à face avec un T800, quelque chose que je ne connais pas. Je suis ravis par son intérieur bois contreplaqué vernis, ses rideaux à carreaux rouge-ringard-vintage. Une table, un lit, des rangements, le tout aménagé avec la plus grande modestie d’un bon bricoleur. Je pars quelques jours plus tard, non pour un voyage, mais pour la casse. Le Trafic se porte bien ; je veux lui intégrer un meuble-évier pour avoir de l’eau semi-courante (ça reste un fourgon…). Je récupère le bloc sur un vieux combi WW.

 

En 2020, cette histoire est toujours présente au titre de genèse du projet, celui qui couvre ces pages.

La transition

Je n’ai pas de photos, ni argentique, ni numérique; Pas plus du van, que de mes périples. Je ne peux que compter sur l’agencement des mots pour recréer ces espaces. La route ne trouve pas sa place ici. Plus tard peut-être, selon les bulles qui remonteront. Ce qui importe est la contribution du T800 à ma migration vers les Alpes, vers l’Isère que j’estime toujours être une des plus belles régions de France. Ce qui me fait dire aussi que toutes les régions de France sont les plus belles régions de France. Avec ça, on économise un peu sur la production de carbone qui ruine notre planète. Tiens, je m’égare. Le T800 m’a mènera dans deux lieux marquant de tranquillité, de rêve et de quotidien, finalement.

J’ai usé ma R5 GTL à naviguer les étés entre  Lille et Ceillac. J’aime bien le terrain de camping municipal et son hôte très sympathique qui sait accueillir. La cascade de la pisse, ce nom étrange qui rafraîchi le cerveau et berce les oreilles du matin au soir donne à ce lieu une allure de magie tombée du ciel. Ce petit village en cul-de-sac a contribué à  ma décision de quitter Lille. Je savais que ce serait définitif. Besoin d’air et d’espace ; fatigué de cette ville si belle en son centre et peuplée de voitures avec des espaces cycles et piétons rétrécis. De l’air, de l’air.

Voreppe est mon premier point de chute en Isère pour un entretien professionnel qui s’est bien passé et ce n’est pas le sujet. Le T800  fait son premier trajets de 900 kilomètres. L’ambiance intérieure est au beau fixe, le mouvement, le changement qui s’énonce me rempli de joie. Ça suinte par toutes les pores du van. Pour tout dire, je me sens comme un imbécile heureux. Ce n’est pas qu’une idée, j’en suis certain. Je roule toute la journée sous un soleil qui ne décroche pas et c’est bon.  Tard dans la soirée, j’arrive après une recherche fouillée, à St-Joseph des rivières où je ne vois pas la rivière. Pas important ; je me trouve un endroit qui domine la vallée et la ville de Voiron avec ce drôle de sentiment : avoir traversé de si nombreuses fois cette ville et m’entendre dire en mon for intérieur que j’aimerais bien habiter ici. Nous sommes en début juin et je quitte Lille la troisième semaine de juillet pour emménager dans un appartement en plein centre, près de la gare. Ça tombe bien, car lorsque je roule avec le T800, j’entend le réservoir faire un bruit d’évier qui  siphonne. J’ai quitté un emploi et le prix à payer est un salaire divisé par 2,5. C’est le pris du rêve. Certains rêvent d’une belle voiture et moi de ne plus en avoir. Côté salaire ça ne peut que réussir.

En fin juillet 95, après avoir pratiqué deux ou trois aménagements d’ordre technique, je suis fin prêt pour un premier périple post déménagement. Ceillac en Queyras ne sera pas le lieu de destination, étrangement. Je me suis arrêté dans un hameau dont je n’ai pas regardé le nom sur le panneau. Quelques part au nord de Guillestre. J’ai beau chercher sur une carte, je ne retrouve pas le nom. Situé à 2000 mètres d’altitude, j’ai pu m’installer dans une aire de camping naturelle. Equipement de base, WC et de quoi laver un peu de vaisselle. Pour se laver, par contre, rien mais ce rien a des allures de cuves comme on en trouve du côté de Sassenage. Sauf qu’ici, elles sont toutes petites et coincées dans le cheminement d’un cours d’eau peu profond. Chaque matin je vais me plonger dans cette eau glacée pour me laver. Pour sur, j’économise le savon ( biodégradable) en même temps que les calories dans cette glace liquide. Chaque fin d’après midi, j’y retourne pour me rafraîchir, sans savon. Parce que début août, même à 2000 mètres d’altitude, il fait chaud. Si le vent aide à apaiser la morsure des rayons du soleil, il donne froid aussi… Et pas seulement ; il porte les effluves des herbes séchées et souligne la vie en surface de la croûte terrestre qui ondule. Au loin, ce sont les ondes de chaleur qui se matérialisent pour mes yeux hypnotisés… Peu de voisins aux alentours, hormis ceux, plutôt rares, qui font une halte pour la nuit, parfois pour deux nuits, mais guère plus. Deux semaines en plein air avec des conditions de vie assez minimalistes. Juste encombré de quelques livres, un carnet de note qui n’a jamais servi à écrire ces mots mais plutôt à dessiner une maison en paille qui restera dans le cahier. La vie change les plan, parfois. Je descends au village pour le pain et quelques appoints tous les jours. A pieds bien entendu. Le T800 reste la majorité du temps sur place, une petite plateforme qui domine un pan de la vallée et ma boulangerie adoptive. Je passe du temps à lire en tournant autour du T800, à chercher un peu d’ombre. Et au grès de mon humeur matinale, je pars en randonnée. Départ à 9h00 et retour vers 21h00. Je grimpe à la conquête de rien ; ce sont les paysages alpins qui m’emprisonnent dans une beauté à toute épreuve, à toute pensée. Le soir venu, je reste à contempler l’horizon assez court qui donne sur les massifs alpins. J’écoute. C’est un étrange mélange, un mini capharnaüm de piaillements discontinus d’oiseaux pris dans une bise légère. On est pas obligé de tout saccager, tout transformer, tout aménager. Les actes de civilisations rentrent avec beaucoup plus de difficulté dans mon cerveau. Il est endommagé par l’excès. Vu comme ça, on pense à une activité sociale restreinte. C’est vrai et ça compense, ou récompense, très largement celle de tous les autres mois de l’année passée en compagnie de nombreuses personnes au quotidien. On appelle ça une forme d’équilibre. J’ai en fin de compte besoin de faire tête neuve pour construire une vie ailleurs, cet endroit qui commence et m’attend à Voiron près de la gare. L’une de ces merveilleuses gares qui m’envoûtent depuis bien longtemps maintenant. Une transition…

Il est de passage

… Lui aussi, le T800. Je m’en sépare après l’hiver, faute de moyen pour entretenir et suite à une casse de boite de vitesse à Langres, en route pour une visite chez mes amis lillois. En ce qui me concerne, sa vie ne s’arrête pas là, je le recycle dans mes souvenirs avec toutes les journée, les kilomètres et les nuit absorbées entre Lille et Gap, trajectoire de son rayonnement.

Aujourd’hui

J’ai mûri, c’est une façon de dire que j’ai vieilli. Pas beaucoup, juste 23 ans. Un peu teigneux et patient, je retourne vers mes premiers élans brisés par la vie. C’est à dire moi-même. Entre le désir d’une vanescence, – oui, je sais, ce mot n’existe pas, et alors ? Et l’envie de créer quelque chose qui ne soit pas un camping-car, il m’a semblé que transformer un utilitaire en autocaravane valait la peine de se défoncer la caisse. C’est ce que j’ai fait. La pratique du tir à l’arc a encouragé ce projet. Les concours amicaux ou officiels sont souvent à plus de deux heures de route de St-Jeure d’Ay. C’est devenu un gène assez rapidement en terme de fatigue. Deux heures de route ajoutées à huit heures de présence dont trois de parcours. Je ne pratique pas le tir à l’arc en salle, qui est une discipline bien différente. Quoi que certains puissent en penser. Alors voilà, tous ces petits facteurs se sont conjugués pour se constituer éléments déclencheurs de ce projet. Très beau et fastidieux projet.. Et la genèse s’arrête ici car je viens d’atteindre la frontière du sujet initial…